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Existe-t-il une consommation raisonnable de pornographie ?

Existe-t-il une consommation raisonnable de pornographie ?

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C’est compliquĂ©.

« Il n’y a pas de mal Ă  se faire du bien ! »
On pourrait utiliser cet adage pour parler de pornographie. En effet, beaucoup de personnes qui regardent des vidĂ©os Ă  caractĂšre pornographique de temps en temps ne semblent ni affectĂ©es, ni dĂ©sĂ©quilibrĂ©es, et semblent vivre en couple sans difficultĂ©. On entend le mĂȘme discours chez les consommateurs occasionnels de drogue : de temps en temps, en soirĂ©e, ça ne fait pas de mal, et le risque de l’addiction est loin. C’est vrai, on peut vivre tout Ă  fait normalement en fumant un joint de temps Ă  autre, ou en regardant une vidĂ©o porno Ă  l’occasion, en groupe, ou seul.

NĂ©anmoins, une documentation scientifique croissante Ă©tablit qu’il y a dans le porno, tous les Ă©lĂ©ments nĂ©cessaires pour dĂ©velopper chez certains sujets une addiction. En effet, le visionnage d’images pornographique, agit sur la zone du cerveau primitif appelĂ© « circuit de rĂ©compense Â» oĂč sont ressentis plaisir et dĂ©sir. C’est Ă©galement la zone du cerveau oĂč se dĂ©veloppent les addictions1. La question qui se pose ici est la suivante : quel est le niveau de consommation raisonnable pour Ă©viter les effets nĂ©fastes du porno ? Y-aurait-il une stratĂ©gie de la modĂ©ration ?

Dans son Ă©tude ‘Porno addiction, nouvel enjeu de sociĂ©tĂ© ?’, David ReyniĂ©, explique que le porno se distingue des autres addictions comme Ă  l’alcool, les drogues ou les jeux vidĂ©o en ce qu’il interfĂšre avec un puissant circuit neurologique prĂ©existant dans notre cerveau : celui liĂ© au sexe et Ă  la reproduction. C’est-Ă -dire que le risque n’est pas seulement de crĂ©er une dĂ©pendance, mais Ă©galement d’altĂ©rer, de modifier les stimuli auxquels rĂ©pond notre sexualitĂ© [
] Le degrĂ© d’altĂ©ration neurologique liĂ©e au porno est davantage comparable Ă  un variateur qu’à un interrupteur. Quel que soit le degrĂ© de consommation, le cerveau est constamment en train d’apprendre, de changer et de s’adapter Ă  l’environnement. Les Ă©tudes rĂ©vĂšlent qu’une faible quantitĂ© de stimulus supernormal suffit Ă  altĂ©rer rapidement le cerveau et Ă  modifier le comportement2. Ainsi, quelle que soit sa frĂ©quence, la consommation pornographique induit immĂ©diatement des altĂ©rations neurologiques, croissant avec le niveau de consommation.

Si l’on se place maintenant du point de vue de l’industrie pornographique, (qui draine 30% du trafic internet actuellement), peut-on concevoir un entre-deux, et laisser la place Ă  une diffusion “raisonnable” de contenus explicites ? Y aurait-il une consommation bĂ©nigne ? Regarder de temps en temps des vidĂ©os pornographiques, c’est cautionner, mĂȘme Ă  petite Ă©chelle, le fonctionnement de cette industrie. En effet, sur le web, la visite Ă©quivaut Ă  une demande, et c’est la demande qui permet au business model de fonctionner. DerriĂšre ces diffusions massives de vidĂ©os en ligne se cache des acteurs et des actrices souvent exploitĂ©s, travaillant dans des conditions humiliantes voire violentes. Conscients de cette rĂ©alitĂ©, le consommateur ponctuel pourra nuancer la fameuse idĂ©e ‘il n’y a pas de mal Ă  se faire du bien’, comme en tĂ©moigne Diego, 31 ans : « J’ai rĂ©alisĂ© que le porno Ă©tait une industrie capitaliste qui fonctionne avec des acteurs et des actrices, souvent exploitĂ©(e)s pour enchaĂźner des saynĂštes de vingt minutes. Leurs conditions de travail sont Ă  mille lieux de ce que montre la camĂ©ra. Les vidĂ©os ont alors perdu tout leur charme3. Â»

Si l’on accepte les conclusions scientifiques qui soulignent le phĂ©nomĂšne d’addiction croissant et quasi-inĂ©luctable causĂ© par la consommation de pornographie, il semble prudent de prendre du recul et de ne pas chercher un compromis avec des contenus et une industrie aux effets nocifs. Pour autant, toute personne souhaitant arrĂȘter une consommation compulsive de pornographie se verra conseillĂ©e par les thĂ©rapeutes spĂ©cialisĂ©s de ralentir progressivement sa consommation et non brutalement afin de garantir un sevrage optimal. C’est ce parcours difficile mais faisable que propose le programme Revival.

[1] Robert Weiss, << Not every porn user struggles, but some do >>, PsychCentral, 06/04/2020

[2] David Reynié, << Porno addiction : nouvel enjeu de société >>, Fondapol, 16/03/2017

[3] Laurence Daycare et Sarah Gandillot, << J’ai arrĂȘtĂ© le porno >>, Causette, NumĂ©ro 93 du 28/09/2018

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